L’Ex-Président de la République Henri Konan BEDIÉ repose à jamais dans son village natal Pépressou. Il a été porté en terre avec tous les honneurs de la République dus à son rang. Il fut d’une part une personnalité politique de haut niveau et un acteur principal du développement sociopolitique et économique de la Côte d’Ivoire et d’autre part une personnalité controversée eu égard aux différents conflits politiques qu’a connus les Ivoiriens sous sa gouvernance, après le décès du père de la nation, le Président Félix Houphouët BOIGNY dont il fut l’héritier constitutionnel en 1993.
En effet, l’Ex-ministre de la Communication du gouvernement BEDIÉ, madame Danièle Boni Claverie par ailleurs Présidente du parti Union Républicaine pour la Démocratie (URD), dans un discours d’hommage lors des obsèques de l’Ex-Président feu Henri Konan BEDIÉ, est revenue sur le concept de L’IVOIRITÉ dont la compréhension et l’assimilation voire la philosophie ont été mal perçues par les Ivoiriens à l’aune du passage de l’Etat-parti au multipartisme. Dans ce discours qui relève d’une confession d’échec du rôle que son département devrait jouer dans la bonne compréhension de cette doctrine, a indéniablement convaincu les Ivoiriens du stratagème politique qui a foncièrement divisé le peuple de Côte d’Ivoire pour des raisons politico-politiciennes.
Dans son allocution de témoignage elle affirme que : « (…) au décès du Président Félix Houphouët BOIGNY, j’ai fait partie de ceux et de celles qui ont accompagné le Président BEDIÉ dans sa prise du pouvoir et j’ai été fière de faire partie de son équipe gouvernementale et d’avoir appartenu à ses trois gouvernements successifs. Je garderai en mémoire sa brillante intelligence, la clarté de ses démonstrations, et son humour face à son rire que j’ai beaucoup apprécié. Je voudrais ici apporter mon petit témoignage à ce faux procès fait à Henri Konan BEDIÉ. Il s’agit du fameux concept de l’IVOIRITÉ. En tant que son ministre de la Communication d’alors, j’ai eu à expliquer qu’il s’agissait d’abord d’exalter les valeurs ivoiriennes et d’affirmer une identité nationale distincte du sentiment d’appartenance ethnique traditionnelle. Il est vrai que certains par zèle et d’autres par opportunisme politique ont donné une connotation excessivement négative à ce concept, accusant les autorités d’alors d’être sectaires et xénophobes. En fait, il s’agissait de créer, de donner une identité à l’Etat-nation en construction sans exclure qui que ce soit. Je dis bien qui que ce soit. Il fallait que cela soit dit. Il faut que les jeunes générations sachent que la Côte d’Ivoire, petite taille a été grande par l’envergure de certains de ses hommes et de ses femmes dont Henri Konan BEDIÉ, ont contribué à la renommée de notre pays… »
Certes l’hommage est à saluer, il n’en demeure pas moins que les choses soient dites de façon responsable et efficiente pour que la jeune génération sache la genèse des conflits politiques qu’a traversés la Côte d’Ivoire sous la mandature de feu Le Président Henri Konan BEDIÉ.
En effet, les concepts de renforcement de l’identité, de cohésion nationale, de patriotisme, d’unité nationale sont nécessaires voire importantes pour toutes les nations. Cependant s’en servir pour exclure une communauté nationale pour des raisons politico-politiciennes est à proscrire fondamentalement. Car au lieu d’unir ils finissent par diviser. Les concepts de Panafricanisme, de Sénégalité, de Soudanité, Francité, Négritude, Ivoirité etc. ont eu leurs lettres de noblesse pendant la colonisation. Alors réinventé le concept de l’Ivoirité pour exclure un adversaire politique ne peut qu’engendrer un conflit politique nationale.
La succession du premier Président de la République de Côte d’Ivoire a engendré une dissension politique entre le Premier ministre d’alors, Alassane OUATTARA et l’héritier Henri Konan BEDIÉ par ailleurs Président de l’Assemblée nationale. Un conflit né d’une suspicion qui relatait que le Premier ministre ambitionne de prendre le pouvoir en faisant abstraction à l’article 11 de la constitution qui prévoyait l’assurance de l’intérim du pouvoir par le Président de l’Assemblée nationale.
En effet, la prise du pouvoir par le dauphin constitutionnel en 1993 qui voyait dans cette atmosphère de suspicion alambiquée une adversité, a fini par créer une phratrie entre les cadres du PDCI-RDA. En outre, l’outrecuidance avec laquelle le Premier ministre Alassane OUATTARA par ailleurs deuxième personnalité du PDCI-RDA fut remercié nonobstant le travail remarquable qu’il a accompli pour remettre l’économie de la Côte d’Ivoire sur les rails, qui par ailleurs était au bord de la banqueroute a suscité un émoi dans la famille des Houphouëtistes. La dissension politique a fini par diviser les cadres et donner naissance à un nouveau parti politique, le Rassemblement Des Républicains (RDR) qui a réussi par convaincre l’Ex Premier ministre Alassane OUATTARA d’être son leader. Cependant, après la démission de celui-ci et son gouvernement, il a rejoint le Fonds Monétaire Internationale (FMI) à New-York. C’est après quelques années d’hésitation qu’il a fini par accepter la proposition à lui faite par les fondateurs du RDR dont le secrétaire général fut Djeni KOBENA. Il décida alors de rentrer en Côte d’Ivoire en 1995 pour participer à l’élection présidentielle. C’est à partir de son intention et l’annonce de sa candidature à l’élection présidentielle que naquirent son crime de lèse-majesté et la réinvention du concept de l’IVOIRITE à l’effet de le mettre sous l’éteignoir.
Alors commença le périple de la reconnaissance de sa citoyenneté jusqu’à sa participation et sa victoire à l’élection présidentielle de 2010. Que de chemin parcouru ! L’histoire est un témoignage.
“ Une nation qui oublie son passé n’a pas d’avenir” Winston CHURCHILL
“Dans la vie des Nations, alternent la grandeur et la médiocrité” Georges POMPIDOU
*Idriss Dagnogo*
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